Observer la colère

Quand la colère est présente en moi, je suis conscient :

" La colère est présente en moi."

Quand la colère n'est pas présente en moi :

" La colère n'est pas présente en moi"

Quand la colère commence à apparaître :

" J'en suis conscient."

Quand la colère déjà apparue est abandonnée :

" j'en suis conscient "

Quand la colère déjà abandonnée ne réapparaîtra plus dans l'avenir :

" J'en suis conscient."

Cet exercice consiste à observer attentivement notre colère.

Le Bouddhisme enseigne qu'une personne est composée de cinq agrégats - forme, sensations, perceptions, formations mentales et conscience La colère fait partie de l'agrégat des formations mentales et la sensation désagréable qui l'accompagne appartient à l'agrégat des sensations. La maîtrise de notre colère est une étape importante sur le chemin de la pratique.Identifier la présence ou l'absence de colère est source de nombreux bienfaits. Pour accomplir à fond notre travail d'observation attentive, nous l'allions à la respiration consciente.

Premier bienfait constaté de l'observation attentive de la présence ou absence de colère : nous sommes bien plus heureux quand la colère n'est pas présente. La colère est une flamme qui jaillit et consume notre maîtrise, nous faisant penser , dire et faire des choses que nous regretterons ensuite. Les actes du corps, de la parole et de l'esprit commis sous l'emprise de la colère nous emporte loin sur le chemin de l'enfer. Nous n'avons peut-être jamais connu les enfers Avici, mais pouvons clairement voir qu'une personne en colère se trouve dans l'un de ses enfers brûlants.

 Colère et haine sont les matériaux construisant les enfers Avici.

Un esprit dénué de colère - calme, frais et sain - est l'une des onze formations mentales positives. L'absence de colère est la base du vrai bonheur, la base de l'amour et de la compassion.

Deuxième bienfait de l'observation attentive de la présence ou absence de colère : identifier notre colère suffit à lui faire perdre un peu de son pouvoir destructeur. Elle ne devient destructrice que si nous ne l'observons pas attentivement quand nous la ressentons. Quand elle naît en nous, suivons étroitement notre respiration tout en identifiant notre colère et en l'observant attentivement. En faisant ainsi, nous avons déjà engendré l'attention, et la colère ne peut plus monopoliser le champ de notre conscience. La pleine conscience accompagne la colère : " je sais que je suis en colère." Cette conscience est une compagne pour la colère. L'observation attentive ne consiste pas à refouler ou à chasser notre colère, mais juste à veiller sur elle. C'est un principe très important dans la pratique de méditation. L'observation attentive est une lampe lumineuse. Ce n'est pas un juge. Elle éclaire notre colère, la prend en compte,veille sur elle avec un soin affectueux, comme une soeur aînée veillant sur sa petite soeur et la réconfortant.

Quand nous sommes en colère, notre colère est notre être même. La refouler ou la chasser , c'est nous refouler ou nous chasser. Quand nous sommes joyeux, nous sommes joie. Quand nous aimons, nous sommes amour. Quand nous haïssons nous sommes haine. Quand la colère est née, nous pouvons être conscients que cette colère est une énergie intérieure et changer cette énergie en une autre sorte d'énergie. Pour la transformer, il faut d'abord savoir l'accepter. Par exemple, une poubelle de manière organique malodorante et en décomposition, peut être transformée en compost et plus tard en belles roses. Au début, nous considérons peut-être détritus et fleurs comme deux choses séparées et opposées; mais en regardant avec profondeur, nous voyons que les fleurs existent déjà dans le détritus et le détritus existe déjà dans les fleurs.

Extrait de "Transformation et guérison" de Thich Nhat Hanh (1990 - Ed.Albin Michel)